**Syrie, Liban, Turquie et Palestine : Entre les intérêts des « grands » et les ambitions des « petits »**
**Mouvements sur le terrain pour redessiner la carte de la région**
**Par Hani Al-Kenissi (Journaliste)**
Les médias israéliens évoquent des plans d’« occupation de longue durée » à Gaza, au Liban et en Syrie, dans le cadre de la « stratégie des généraux » approuvée par le conseil de guerre dirigé par Netanyahou. L’objectif affiché est de « prévenir toute attaque surprise similaire à celle du 7 octobre 2023 ». La mise en œuvre de ce plan est déjà bien visible à Gaza et au Liban, sous couvert de la lutte contre le Hamas et le Hezbollah, considérés comme des relais de l’Iran.
En Syrie, où Israël occupe déjà le Golan depuis 1967, la situation est encore plus complexe. Plusieurs grandes puissances aux ambitions déclarées ou cachées y sont impliquées : la Turquie, la Russie, les États-Unis et l’Iran.
Le **New York Times** a récemment publié des images et des cartes révélant qu’Israël a déjà commencé à bâtir un réseau étendu de bases et de fortifications sur le territoire syrien, bien au-delà de la « zone tampon frontalière » souvent évoquée par le ministre de la Défense israélien, Yisrael Katz. Le journal affirme qu’Israël est « prêt à rester en Syrie indéfiniment », en s’appuyant sur des témoignages et des preuves montrant la construction de tours de surveillance, d’infrastructures routières et de communications dans plusieurs localités syriennes récemment occupées.
D’autres sources occidentales rapportent que l’armée israélienne annexe systématiquement de nouvelles terres dans les provinces de Quneitra et de Deraa, tout en multipliant les frappes aériennes contre des cibles militaires syriennes, y compris des aéroports et des entrepôts d’armes. Des rapports détaillent également comment Israël saisit du matériel militaire lourd appartenant à l’armée syrienne, y compris des chars et des canons, et les transfère au-delà de la zone tampon du Golan.
Selon ces sources, Israël a déjà établi **une zone de sécurité en Syrie**, comprenant **neuf bases militaires** et s’étendant sur **15 kilomètres de profondeur** depuis la frontière. En outre, une zone d’influence plus vaste, atteignant **65 kilomètres de profondeur**, regroupe environ **un million d’habitants**, dont une majorité de Druzes.
Des médias évoquent également un projet israélien appelé ** »le Corridor de David »**, qui s’étendrait du sud au nord de la Syrie pour relier les zones sous contrôle israélien aux territoires kurdes de l’est et du nord. Ce corridor, accompagné d’un axe aérien, renforcerait l’influence d’Israël sur la région et sécuriserait une continuité territoriale entre le sud du Liban, le sud de la Syrie et les frontières de l’Irak.
### Stratégie israélienne et équilibre des forces
Fait notable, Israël a récemment bombardé la plupart des aéroports militaires syriens, à l’exception de **trois** :
1. **L’aéroport de Hmeimim**, contrôlé par la Russie sur la côte syrienne.
2. **L’aéroport militaire d’Al-Seen (ou As-Suqqal)**, situé à 90 km au nord-est de Damas.
3. **L’aéroport de Dumeir**, récemment utilisé par les forces du « Free Syrian Army » soutenues par les États-Unis.
Un expert militaire syrien cité par un centre de recherche stratégique souligne qu’Israël aurait pu **détruire l’ensemble des aéroports syriens**, sauf **Hmeimim**, ainsi que toutes les défenses aériennes syriennes, à l’exception du **bataillon 16**, situé près de la base de Dumeir et considéré comme la position de défense aérienne la plus puissante du pays.
La situation en Syrie représente donc un **délicat jeu d’équilibre** pour Israël. D’un côté, elle défie ouvertement les lois internationales et les résolutions de l’ONU. De l’autre, elle avance prudemment entre les intérêts de puissances majeures telles que **la Russie, les États-Unis, la Turquie et l’Iran**.
### Les nouveaux ennemis d’Israël : Damas et Ankara
Israël semble désormais focalisé sur deux cibles prioritaires :
1. **Le nouveau régime syrien dirigé par Ahmad Al-Sharaa**.
2. **Le gouvernement turc de Recep Tayyip Erdogan**.
La télévision publique israélienne a récemment qualifié Al-Sharaa d’**« islamiste en costume-cravate »**, cherchant à séduire l’Occident tout en représentant un **« ennemi acharné d’Israël »**. Les médias israéliens l’accusent d’avoir **libéré des membres du Hamas et du Jihad islamique** emprisonnés sous Bachar al-Assad.
En parallèle, le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Sa’ar, a décrit Erdogan comme **un « dictateur antisémite »** et **un « danger pour la région »**, appelant l’OTAN à **le sanctionner**.
Ces attaques verbales coïncident avec une réunion stratégique tenue par Netanyahou et son état-major pour **contrer l’influence turque croissante en Syrie** et **renforcer l’alliance militaire avec la Grèce**.
### La présence turque en Syrie : une ligne rouge pour Israël ?
Les médias israéliens ont récemment publié des rapports alarmistes sur le **déploiement militaire turc** en Syrie, notamment sur les bases aériennes de **T4 et Palmyre**, situées dans la province de Homs et récemment ciblées par des frappes israéliennes.
Des sources israéliennes affirment qu’Ankara envisage d’y installer des systèmes de défense aérienne **Hisar-O et Hisar-U**, ainsi que le système à longue portée **SIPER**. Il est même question d’un possible déploiement du **redoutable S-400 russe**, sous réserve d’un accord avec Moscou.
Si un affrontement direct entre Israël et la Turquie semble improbable à court terme, les tensions militaires et géopolitiques entre ces acteurs, ainsi que l’implication d’autres puissances en coulisses, pourraient bien **transformer la Syrie en un champ de bataille à haut risque**.
**Que Dieu protège le peuple syrien.**